En fin d'année 2008, LI Huan, l'un des principaux représentants de 419, manifestation des chinois à Paris suite à l'affaire de la flamme olympique, s'est présenté dans une interview télévisée qui sert en même temps de rétro de cet événement qui a marqué de nombreux chinois, notamment les jeunes. Ci-dessous est la traduction de l'interview. Si la vidéo ne s’affiche pas correctement, cliquez ici.
Transcription de l'interview à la CCTV
(Traduction: Delphine Zh. DONG)F : Nous avons suivi de nos yeux le parcours de la transmission de la flamme olympique, sans cela, nous n’aurions pas connu un garçon ordinaire, qui s’appelle LI Huan ; nous ne saurions pas non plus ce qu’il a ressenti à l’intérieur. Alors maintenant, ensemble, nous allons le rapprocher, le comprendre. Voyons cet épisode :
(sur le grand écran)
Le 19 avril 2008, la Place République, Paris, France
voix de LI Huan, puis voix-off masculine :
Le 19 avril 2008, sur la place République à Paris. Des milliers de Chinois résidant en France se’y sont réunis pour une manifestation « Pour les JO de Pékin, Contre les reportages non objectifs ».
Voix de LI Huan, puis voix-off masculine :
Sur cette place construite aux souvenirs de la Révolution Française, à l’occasion de ce rassemblage des Chinois, dit le plus grand dans l’Histoire européenne, c’est bien ce garçon qui s’appelle LI Huan qui a donné ce discours.
Voix de LI Huan : « je suis d’origine de AnYang de la province du He Nan. Lors de la Gjuerre sino-japonaise, mes grands-parents se sont réfugiés à Xi’An, ils m’ont offert ce nom, (qui signifie) premièrement les fleuves coulent sans cesse/chuan liu bu xi(洹), deuxièmement ne pas oublier son pays ni son lieu d’origine, la racine de soi
Voix-off masculine : « Il y a 12 jours, au cours de la transmission de la flamme olympique à Paris, un pro-tibétain s’est mis à arracher la flamme dans la main de JIN Jing assis sur la chaise à roulettes. »
Voix de LI Huan: « Dans le monde, il existe de divers concept du monde et concept des valeurs. Il faut juste que chaque vision soit construite sur une base d’objectivité et de justice. Je crois que nous sommes en train de défendre le principe de la justice des médias, aussi bien que la dignité de la nation chinoise. »
Voix-off masculine : « Aux yeux de certains, les termes comme la responsabilité sociale, l’obligation publique semblent faire défaut chez les jeunes de la génération de LI Huan. Néanmoins, dans un endroit loin de la patrie et des parents, ces (jeunes qui demeurent) enfants au regard des adultes ont manifesté une force brillante. »
Voix de LI Huan : « Si la responsabilité de l’Ambassade de Chine est de défendre la dignité et l'intérêt du pays, alors nous, les étudiants faisant les études à l’étranger/liu xue sheng, sont les ambassadeurs populaire/non-gouvernement
aux. Ce que nous communiquons, ce sont des choses plus simples et plus sincères, c’est ce que ressentent et ce que pensent les Chinois ordinaires. »
Voix-off masculine : « Aimer la patrie à la chinoise, donner le discours à la française, communiquer au nom d’un coeur et du sentiment blessés ; ainsi, en même temps qu’il a défendu la dignité de la patrie, il a aussi défendu celle de la nation française. C'est bien ça qui a marqué le LI Huan de ce jour même.»
(slogans) Vive la Chine ! Vive la France ! Vive les peuples ! Vive la communication entre les peuples !... (fin-épisode, retour sur le plateau)
F : Maintenant, souhaitons la bienvenue à LI Huan! ... Lors du discours, LI Huan a eu raison de parler fort. Pour donner un discours devant tant de monde, tu devrais être très sûr de toi ?
LI : Oui, j’ai eu confiance en moi. C’est que premièrement, j’ai la capacité, je crois en moi-même, j’ai eu l’expérience de parler devant la caméra, et dans ma vie quotidienne il y a souvent ce gendre de débats. Deuxièmement, derrière moi, c’est 1,3 milliard de Chinois mes compatriotes, c’est des milliers et des milliers des étudiants chinois à l’étranger. Je n’ai jamais douté de moi-même, ni de ces gens qui se présentent devant moi.
H(il s’appelle BAI Yansong, animateur central mais plutôt lucide) : J’aimerais y ajouter un mot. Tout à l’heure j’ai été bien impressionné...Est-ce que tu as jamais pensé à cela? (A ce que ) tu as des larmes dans les yeux lorsque tu évoques les termes comme la patrie, le peuple ?
F : Lorsque tu était petit...
LI : Non. Je crois que cette sorte de sentiment viendra tout doucement. Comme on a grandit, on parvient à connaître certaines choses, à les comprendre et les analyser, et on comprend davantage que beaucoup de choses ne sont pas faciles. J’appartiens à un pays dont je suis fier. (larmes aux yeux)
LI : Pardon, j’ai été un peu ému. Tout à l’heure je regardais les héros (les trois astronautes en uniformes bleus en plan rapproché), et je me rappelle de notre situation d’alors...Tout est possible à ce moment-là, car certains de nos camarades ont reçu les appels et les méls anonymes, (menaçant que) si vous continuez, nous allons vous faire des explosions et des attaques armées...Je n’y ai pas pensé. Je me souviens qu’à l’époque, je me suis préparé pour tout...
F : Toi aussi, à l’époque, tu t’es préparé pour tout (Cf: la possibilité de la mort à laquelle auraient dû faire face les trois astronautes avant leur départ de la Terre)
LI : Oui. A l’époque j’ai bien des préoccupations pour mes parents, j’ai pensé que comme je ne me suis pas marié, j’ai pas d’enfants, rien, et que je suis fils unique, si un jour j’avais qch, comment feraient mes parents ? Donc j’ai eu un peu de souci pour cela.
F : Mais tu les as appelés à l'époque?
LI : Non.
F : Tu n’as pas demandé leur avis non plus ?
LI : Je n’ai pas osé leur en parler.
F : Tu n’as osé rien dire, et puis tu t’es décidé comme ça ?
LI : Oui...J’ai pensé que si jamais il y avait quelquechose, je...je les confierais à l’Etat..
F : L’une des phrases de LI Huan est très importante, il a dit que son sentiment pour la patrie, pour le peuple, s’accumule petit à petit, et se sent au fur et à mesure qu’il grandit. Est-ce que ça a aussi un lien étroit avec ton séjour en France en tant qu’étudiant ?
LI : Oui. La vie d’étudiant à l’étranger m’a fait comprendre que plus qu’on est loin, plus la famille nous manque. Pour chaque enfant c’est comme ça : disputer avec les parents dans la famille, en pensant qu’ils ne sont pas sympa; mais une fois quitté la famille, on se sent très proche avec eux. La vie est pareille pour les étudiants à l’étranger. Nous aussi sommes les hommes et nous avons des sentiments, nous sommes loins, et nous avons la famille ici(en Chine)...Disons que nous pensons souvent à certaines choses (d’ici). Donc...ce genre de sentiment s’extériorise au fur et à mesure. D’ailleurs puisque nous avons été blessés, que nous nous trouvons mal compris d’autant plus que notre Famille est blessée. Eux (les médias français) ont des préjugés contre nous, les préjugés bien arrogants...
F : Tu pourrais donner un exemple ? un exemple que tu rencontres le plus quotidiennement ?
LI : ...La première fois que je suis arrivé en France, on me dit, d’où viens-tu ? je dis de la Chine. ...Ca va ? (Mei Shi’er ba ?) C’est vrai que quand tu t’exprimes, on te met en prison ? Ca va ?
H : « Ca va »...haha...Lui ca va bien ?
LI : Ben oui, « ca va sans problème ? » à demander à lui...Voilà, donc pourquoi poser de telles questions ? ...Chez vous il y a un gouvernement autoritaire, les gens vivent dans les ténèbres ? Je dis mais non, j’ai une famille ordinaire, mon papa est un agent de police ordinaire, ma maman est une professeur ordinaire, ils aiment la vie et s'en réjouissent comme tout le monde. Leur vie s’améliroe de plus en plus, notre famille a acheté un nouveau appartement l’an dernier.
F : Alors est-ce que tu continues sans cesse de réfléchir après (ces interrogations), pourquoi tu vas continuellement communiquer, expliquer, communiquer encore, et expliquer encore ? Quelle est la raison pour laquelle tu fais ces réflexions ?
LI : les raisons sont...l’écart/l’incompréhension, la distance, l’idéologie, la façon de penser ; nos cultures, la couleur de nos peaux, nos religions, nos fonds sont tous différents. Pour eux, ceux qui viennent de la Chine n'ont pas de différence avec ceux qui viennent du Mars...Ca fait 7 ans déjà, (je) réfléchis tous les jours: comment changer ce genre de préjugés. Changer les préjugés n’est pas de s’y affronter, mais de raisonner, de donner les raisons, les raisons qu’ils peuvent comprendre. Je dis que vous pouvez avoir toutes sortes de points de vue, mais vous ne nous en imposez rien. Nous pouvons apprendre auprès de vous. Ca fait déjà 100 ans que nous apprenons, et nous continuerons à apprendre auprès de l’Occident.
F : Et eux ils iraient dire qu’ils ont leur concept de valeurs à eux.
LI : Oui.
F : Et toi tu comprends leur concept de valeurs...
LI : Je (les) comprends.
F : Et c’est pour ça que tu as préparé un tel texte de discours.
LI : Oui. Je (les) comprends. Leur concept de valeurs n’est pas à en avoir peur.
H : Donc là « la raison » est très importante. Voyons qu’aucun mot n’implique que LI Huan est un jeune indigné(fen qing).
F : Effectivement.
H : Tu as raisonné. Tu t'es maîtrisé avec la raison...
LI : Oui. J'ai réfléchis sur comment leur faire comprendre (lors du discours). D’abord, il s’agit de la manière (de s’exprimer). On était en train d’organiser une manifestation. Nous avons voulu exprimer notre amitié. La nation chinoise est une nation amicale.
F : Par quels moyens extérieurs avez-vous transmis cette information d’amitié ?
LI : Nous avons dressé le drapeau français, le drapeau chinois, le drapeau des JO. Nos slogans sont : « Vive l’amitié franco-chinoise, Vive la Chine, Vive la France. » Lorsque nous étions partis, il était très propre (sur la place République). »
H : Très propre à la place (République) ?
LI : Lorsque nous étions sur le point de partir, nous avons rencontré quelques nettoyeurs qui sont arrivés sur la place, envoyés par la mairie, car ils savaient qu’il y avaient une manifestation et qu’il fallait faire le nettoyage après. En général, après une manifestation en France, il y a partout des tas de journaux, des banderoles jetés par terre, alors qu’il était propre par terre lorsque nous quittions la place. On voyait les nettoyeurs fumer à côté, disant que c’est tant mieux si chaque manifestation puisse être comme celle-là.
H : En ce cas ils seront en chomage.
LI : Ah le chomage, c’est déjà un problème grave.
F : Et ça (ie : de garder la place propre)fait aussi partie de votre organisation de la manifestation ?
H : Aussi un choix raisonné.
LI : Oui, nous avons tout considéré. Tout. C’est-à-dire quelles missions à confier à quels groupes...tout est pris en considération...Derrière moi, autour de moi, c’étaient les camarades qui partageaient les mêmes sentiments avec moi.
F : Donc vous avez une équipe.
LI : Oui, c’est important d’avoir une équipe. Et ce genre d’équipe va se poursuivre. Bien que nous pensons souvent qu’il y a trop d’écart entre la Chine et l’Occident, qu’il y a trop de choses nécessaires à communiquer et à comprendre, beaucoup de choses ne se font pas en une seule fois. On me demande : est-ce que vous avez obtenu des effets positifs suite à cette manifestation, je dis oui. On dis de quelle ampleur ? je dis un petit peu. Impossible (de tout faire en un seul coup)...Je dis que là il y a un mur bien épais...je dis comment pouvons-nous faire ce genre de choses à long terme, durant plusieurs décennies.
H : (Que les choses viennent) doucement.
LI : Nous avons fondé récemment une association qui s’appelle les Amis du Printemps/Si Yue Zhi You. L’Avril, c’est le printemps, ça nous fait comprendre qu’il est nécessaire de communiquer. C’est aussi une graine d’amitié que nous sèmons, et nous prions une récolte des fruits d’amitié en automne. Nous envisageons cela à long terme.
H : Alors on te permet 1 minute pour la pub.
F : Oui...Si yue zhi you.
H: Hé non. Demande d’emploi.
F : Ah, demande d’emploi.
H : Ton ambition professionnelle dans l’avenir ? Peut-être il y a biens des services ou des gens qui pensent à le recruter. Tel un bon jeune homme.
LI : Avant, je portais toujours un rêve de devenir un manager professionnel. Mais à travers cet événement, j’ai découvert une sorte de plaisir, le plaisir que j’ai découvert lorsqu’on organise ce genre d’activités, ensemble avec une équipe qui partage le même rêve avec moi...Je ne sais y réfléchir. Il m’est difficile de répondre à cette question.
F : Peut-être que l’homme de la raison a besoin du temps pour bien réfléchir avant de donner une réponse bien discrète. Ca sent bien le style de LI Huan.
H : Lui recommander au Service Diplomatique. (A l’audience) Vous trouvez comment ?
LI : Urh certes, le diplomate est un métier sacré...
F : (à l’audience) Vous trouvez comment, l’idée de laisser LI Huan devenir diplomate ?
(Audience : Applaudissement...Bravo...)
LI : Merci, merci à tous...Je n’ai pas pensé que mes 26 ans seraient marqués par une telle expérience. Jamais. La vie est à continuer. (Comme dit un maxime chinois, )On sait la force du cheval quand on fait une longue route, on connaît le vrai coeur d'une personne avec les jours/Lu yao zhi ma li, ri jiu jian ren xin.
F : Tu pourrais demander (pour devenir diplomate)...Ce qu’il a dit est très important. Il dit qu’il n’a pas pensé qu’il a pu faire une chose pareille à ses 26 ans. (A LI Huan : ) Tu peux aussi demander à BAI Yansong(l’animateur) ce qu’il a fait lors de ses 26 ans.
LI : Je sais pas...ce qu’on aurait fait n’est pas forcément rapporté (par la presse).
H : Lors de mes 26 ans, j’étais encore dans le sensible(gan xing). Avec le temps et quand on grandit, on apprend peu à peu le rationnel(li xing). Donc je suis très content de voir chez LI Huan, de même que chez tous les jeunes de son âge, la qualité de la raison ; nous en avons été inquiets mais au fait, chez eux, il y a toujours eu cette qualité.
LI : Oui. Nous pensons que la raison et la sensibilité sont tous les deux nécessaires. Je pleure parce que je suis sensible, je donne le discours pour leur faire comprendre parce que je sui rationnel. Chaque individu a ces deux aspects. Je crois que, sans l’un des deux, on ne devient pas l’Homme.
H : Tout à fait...les pleurs et la raison doivent coexister en même temps.
LI : En même temps.
H : Je te remercie ! Je pourrais t’embrasser ?
LI : O toi... J’embrasse alors les deux !... Et puis j’ai encore une chose... voilà, c’est ce que nous pouvons appeler la robe de lutte. En recto : « One China, one family. » En verso : « Faisons des JO un pont, pas un mur. ». Voilà, c'est notre robe de lutte, je l’offre à CCTV!
F : Xiao BAI va le porter...Tu le portes déjà maintenant ?
H : On va le montrer.... (lit sur le T-shirt:) « One China, one family ».
F: (A LI Huan) Laissons-nous une phrase pour exprimer ce que tu penses aujourd’hui.
(LI Huan écrit sur le tableau:)
VENEZ, REGARDEZ UNE VRAIE CHINE !
LI Huan,
Et tous les camarades du 419
(fin de l’interview)
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